Un extrait de : « AZAG et les enfants. »
Il a été facile pour Ibrahim de disposer l’écran au centre de la tôle. Il a ensuite pris quelques instants pour encourager les enfants à décorer ensemble leur projet commun.
Parti à l’extérieur de leur cache, Ayat est revenu avec de longues branches minces qu’il a patiemment entrées dans deux des trous de la cuve, afin de former des bras. Ayant récupéré le voile bleu qu’il avait utilisé pour faire le fantôme, Sayed l’a installé sur la feuille de fer pour qu’elle serve de châle. À partir des restes d’une vieille boite de carton, Shata et Isra ont confectionné des yeux et une jolie bouche rose qu’elles ont eu beaucoup de difficulté à coller sur l’écran. Un vieux chapeau de paille jauni a donné une dernière petite touche coquine au nouvel ami des enfants.
Avec beaucoup d’étonnement, ils ont admiré leur construction. Yahya l’avait peut-être inventé au tout début, mais il n’avait pas prévu un résultat aussi enthousiasmant.
Devant le long panneau de bois bien nettoyé par Yahya, le robot se dresse, plus grand qu’eux, robuste gaillard splendide et sympathique avec son grand chapeau de paille dorée et son châle bleu. Ses yeux également bleus mais un peu croches, lui donnent un air taquin tandis que sa bouche cramoisie semble celle d’un petit qui a mangé une glace aux fraises et en a laissé sécher le long de ses lèvres.
– Il est beau et joyeux, fait remarquer Sayed.
– On devrait l’appeler Azag suggère Isra songeuse.
– Azag?
– Azag…
– Azag!
Le petit groupe s’exclame. Pris dans l’univers déjà créé par leur nouvel ami, conquis par cet étranger
à qui ils ont déjà attribué une personnalité selon leur besoin, saisis par une magie extrêmement rare
dans leur univers de tristesse, ils s’éveillent à un imaginaire qu’ils n’auraient jamais osé créer…
– Qu’est-ce que cela veut dire, Azag? questionne Shata la petite bouche grimaçante.
– Azag, explique Isra, c’est Gaza à l’envers.
– C’est l’envers de la peine… suggère Yahya rêveur.
Les enfants approuvent. La réplique de Yahya les a convaincus.