
Un tapis d’enfants
Si tu n’avais pas été accueilli
Dans cette municipalité canadienne
Si on t’avait laissé te noyer dans les eaux
De l’Atlantique du XXe siècle
Je serais demeurée immuablement
Sur la rive à attendre en vain ton arrivée
Éternellement non née, non mère, non nonna,
À croire que l’humanité dont je fais partie
Ressemble à celui que tu as mis sur ma route
Pour me consoler interminablement de toi.
Si tu n’avais pas été accueilli
Ce jour-là de mai mille-neuf-cent-vingt-cinq
La terre en manque de toi aurait-elle pu tourner?
La bonté de ton âme ce serait-elle répandue
Privée de l’être unique dont tu as laissé la trace?
Le ciel aurait-il pris ton besoin de continuité
Pour l’élever sur la terre comme une immense chaîne?
D’où tu es ce matin, je crie inlassablement ton nom…
Nos berges se font atrocement un tapis de corps d’enfants
Mais la terre que tu as travaillée sait bien elle,
Que Dieu l’a étendue dès l’aurore des temps
Pour que chaque humain lui partage un souffle
Ressemblant au Sien et qui ajouté à l’autre,
Devient inspiration d’amour interdépendante faisant don d’une vie
Se mirant à l’Amour parfait, et effaçant les petits cadavres pour qu’ils existent enfin.