LES MONSTRES.
On y a rassemblé diversité, pauvreté, innocence
Pour se débarrasser de la Présence
D’une authenticité que l’on ne reconnait plus.
Ne me parlez pas d’humanité
Alors qu’elle est désertée, bafouée, mise en lambeaux.
Les Monstres n’existent plus que dans les films,
Ils sont multipliés et apparaissent au grand jour.
Ils se montrent comme au cinéma, bavant, hurlant
Titubant, faisant cliqueter leurs joyaux.
Tandis qu’autour d’eux les gens rêvent de leur ressembler
Pour posséder au moinsautant le Roi-Argent.
Entendez-vous les cris d’enfants, appels désespérés?
Dans Rama on entend une voix plaintive,
des pleurs amers : Rachel pleure sur ses enfants,
elle refuse tout réconfort, car ses enfants ont disparu.[1]
Les siècles passent, s’écoulent comme gouttes de sang
Rien ne change, les Monstres ont tout leur temps.
Nul n’apprend du passé, la planète ne fait que tourner.
On ne dit rien de plus des parents, ils ressemblent tous à Rachel.
Les siècles n’ont pas apaisé l’effroi de l’absence de leur propre chair
Déchirés, ils regardent vers un autre pays où l’on intimide,
Détruit, torture et détient adultes et petits depuis des années
Sans que le Monde n’y fasse rien, au nom du Roi-Argent.
Existe aussi la Guerre, celle que l’on nomme Jamais-Plus
Tandis qu’elle recommence sans-cesse, riche des vies qui n’en sont guère.
L’humain ne sait-il que détruire, n’est-il qu’une inhumanité déguisée?
Rachel pleure ses enfants, et n’en finit plus de sangloter au fil des années.
Tandis que les Monstres rient à gorge déployée.
Et jusqu’à quand pourront-ils gagner?
On y a rassemblé diversité, pauvreté, innocence
Pour se débarrasser de la Présence
D’une authenticité que l’on ne reconnait plus.
Ne me parlez pas d’humanité
Alors qu’elle est désertée, bafouée, mise en lambeaux…
Mais si cet astre giratoire s’arrêtait de virevolter
Pour soudain se diriger vers une autre direction
Si son mouvement entêté prenait la tangente d’aimer
Accompagnée de la Présence oubliée
Si la Terre
enfin se laissait porter par l’Amour?
[1] Jérémie 31, 15