Journée internationale des droits de l’enfant le 20 novembre
Journée internationale des droits de l’enfant le 20 novembre
ÉPHÉMÉRINE
Je n’aurai eu qu’un peu plus de deux ans pour voir le jour
Je serai désintégrée derrière ce lourd baril
Désormais je ne serai plus qu’un vague souvenir d’amour
Le ciel continuera d’éclater sous l’ardeur d’une folie
Nous sommes multiples. Nous représentons l’unicité
Corps souffrant, peuple en fugue, agglomérat désespéré.
Vous ramassez le quotidien, vos peines, gagnez votre pain
J’aurais voulu que vous songiez un jour à me donner la main.
Le sang devient rivière et lac, le mal s’agrippe, c’est la nuit
Quel pays sera la terre où mon village fleurira ?
L’accès aux droits fondamentaux est-il un privilège enfui
N’aura-t-il donc aucun arrêt à cet agir scélérat ?
Quand le soleil se couche, les hordes posément s’avancent
Le froid, la faim, le viol et la torture se profilent
Digues et barrages exécutent la besogne vile
Des trafiquants d’êtres humains en mal de violence
Elles traversent les mers, les pays, les routes et les chemins.
Sait-on qu’on ne cesse de briser par leurs corps l’espérance?
Une maman titube, écrasée de souffrance
C’est la mienne. « Ma mère, j’étais perdue d’avance
L’abus du passeur et sa bestialité dans la cale…
Je n’aurai eu qu’un peu plus de deux ans pour voir le jour
Je serai désintégrée derrière ce baril sale
Désormais je ne serai plus qu’un vague souvenir d’amour… »
Nous voulions éviter la guerre mais rencontrons l’horreur
Sommes-nous moins humains que vous, qui fermez votre cœur
Ma famille s’en ira dans un camp de détention
Vous n’oserez même pas tenter d’y prononcer son nom
Nous appelons Lampedusa comme vous parliez du Pérou
Comment comprendre vos silences alors que nous manquons de tout ?
Mes nattes comme celles de votre fille brillaient au soleil
Encrassées maintenant, gardant mon éternel sommeil
M’oublierez-vous, m’oublierez-vous ? Je ne peux pas mourir en vain.
Tellement d’autres innocents, clandestins ou bien migrants,
Réfugiés morts ou vivants, gémissent à demander du pain
Pour ceux qu’ils aiment. Humanité à genoux âprement.
Prenez soin de mes parents, tentez la coopération.
Sauvez ma vie, donner la leur était la voie de leur raison
Même s’ils arrivent à bon port, leur cœur n’est plus à l’horizon
La solidarité peut-être adoucira leur démission
Désormais et pour toujours je suis Éphémérine
Je n’aurai plus jamais besoin de votre compassion
Dans un autre monde, je serais devenue ballerine
Quand vous verrez ma mère ne lui rappelez que mon prénom
Je n’aurai eu qu’un peu plus de deux ans pour voir le jour
Je serai désintégrée derrière ce lourd baril
Désormais je ne serai plus qu’un vague souvenir d’amour
Le ciel continuera d’éclater sous l’ardeur d’une folie
Paradoxe d’une mondialisation sans âme
Invraisemblance d’un altruisme d’oriflamme
Entrecoupé de murs barbelés et de fonds de cales
J’ai fendu l’air, hurlant jusqu’à en faire scandale
Ne laissez pas Éphémérine, son souvenir si tendre
Son peuple et ceux qui lui ressemblent se faire victimiser
Si nous, gens de la liberté, ne pouvons pas reprendre
Ces êtres que l’on nomme réfugiés, miroir d’humanité
Nous aurons alors manqué notre chemin de liberté
Éphémérine